Au programme de ce dimanche, plantations de bulbes en bordure de terrasse pour nous, chasse au Tienne du Loret, en amont de notre maison. Il est 15 heures et malgré les coups de feu tout proches, un chevreuil broute tranquillement dans ce qui sera bientôt le jardin de mes voisins d’en face, de l’autre côté de la route, en lisière de forêt. Grâce aux jumelles, je distingue un brocard qui n’a pas encore « refait sa tête ». A chaque déplacement de mon compagnon sur la terrasse, le brocard lève la tête tout en continuant à mâcher. Le bruit le maintient attentif longtemps, mais il reste calmement en place et reprend son repas. Un autre chevreuil le rejoint et se tourne aussitôt vers le taillis : son miroir en cœur me confirme qu’aucune structure sociale stable ne s’observe chez le chevreuil : groupe mixte, groupe sexué ou couple, tout est possible en cette saison. La chevrette est davantage sur ses gardes. Elle sursaute au moindre bruit et bientôt, s’enfonce dans le bois en quelques sauts élégants. Le brocard la suit par étapes, en marchant sereinement. |
L’étude naturaliste, c’est une chasse où le fusil est le regard, où les cartouches toujours très limitées sont les connaissances, dont le seul trophée est la victoire sur soi-même : réussir à chuchoter des pieds, taire la langue, penser « sauvage » plutôt que « civilisé ». Il est bien plus facile de gueuler pour rabattre le gibier et de tirer sur tout ce qui bouge, de détruire plutôt que de construire. Comme disait Marguerite Yourcenar : la chasse m’empoisonne l’automne.