La vue d'une brune silhouette m'arrête. Une chevrette paît en paix, détourne quelquefois le regard mais reste en place.
Leur image s'estompe dans les larmes. Puissent des larmes faire tomber les armes.
L'un de mes sentiers préférés s'insinue entre deux collines boisées et longe une prairie étroite bordée de petits fruitiers sauvages. Dans cette haie de délices, une fenêtre a été récemment pratiquée et donne à voir dans la prairie depuis assez loin en montant le sentier. La vue d'une brune silhouette m'arrête. Une chevrette paît en paix, détourne quelquefois le regard mais reste en place. Elle s'agite davantage, se retourne vers un autre être que moi : c'est une autre chevrette qui s'approche par petits bonds de la première, qui trépigne cou tendu. Elles se frottent la tête, cabriolent ensemble et s'éloignent en trottinant... et devisant joyeusement, ai-je envie d'écrire, tant j'ai l'impression d'avoir assisté aux retrouvailles de deux bonnes copines.
Leur image s'estompe dans les larmes. Puissent des larmes faire tomber les armes.
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Souvenir de l'été, où chacun pouvait cheminer en liberté sans risquer de se faire plomber !
Ce matin sur le sentier mordoré, bruisse chaque pas mais bondit sans bruit la chevrette apeurée. Pas vu, juste entendu.
Imaginé, dessiné - jamais aussi bien qu'Albert Uderzo ! Pensé une pensée pour le soutenir, en cette veille d'ouverture de la chasse. Vivement mars. Sous la verte voûte du sentier qui borde le verger préféré du pivert, après avoir salué Églantine et Pimprenelle les élégantes ânesses, se profile un écureuil très affairé. Soudain il me voit ou me sent, disparaît, réapparaît, disparaît tout à fait... mais se fait très bien entendre par de petits cris et gloussements de plus en plus insistants. Cela m'arrive souvent, parfois même l'écureuil reste bien visible et m'invective : il ne lui manque plus que le poing levé ! Lire à ce sujet Vinciane Schockert "L'écureuil roux". Au même endroit, l'an dernier : une ronde de 4 écureuils !
Partis, les décérébrés qui ont campé tout l'été, laissant les lieux ravagés. A venir, les lobotomisés qui vont chasser pour le simple plaisir de tuer. Qu'il est bon de baguenauder. Château de la Haute-Roche : quand l'humanité est ruine, la végétation culmine. La petite fenêtre bleue du domaine de Goupirou.
Tôt ce matin, je rends visite à la colline avant son invasion par les derniers vacanciers à vélo et les randonneurs avides de photos. Autour du hêtre tortueux, les bourdons s'affairent, entre chênes et genévriers, les pinsons se poursuivent, tous les bourgeons ont débourré. Vivement que la feuillaison étouffe davantage cette anthropophonie décidément intrusive. De retour à la maison, il est déjà tard et pourtant, un brocard gourmet s'invite, attiré par les bourgeons et les pissenlits. Pas peureux mais curieux, il pose ses grands yeux de velours sur les oripeaux de notre civilisation. Conversation. Dans sa maison, Demoiselle regardait par la fenêtre
Un brocard venir à elle et parler ainsi : Et bonjour, Bipède amie ! Que votre jardin est joli, que tout m’y semble bon ! Sans clôtures, tapissé de tendres pissenlits, il fleure bon le bourgeon ! Sans mentir, si tous vos semblables pouvaient s’entourer de telles oasis, Quel bonheur ce serait pour nous, hôtes du taillis ! Tout à sa joie, le brocard bondit plus avant : Mais qu’est-ce donc ? Sont-ce là ces fameux monstres tranchants Qui sont dits agricoles mais éventrent les sols sans discernement ? Vrombissent les moteurs, cahotent les tracteurs, quelle puanteur ! Le chevreuil se détourne et trottinant prudemment, Rejoint gagnage et remise, se jurant certainement Que dans ce monde affolant on ne l’y prendrait plus ! En ce jour de brouillard, même le pic vert est blafard. Et il est si haut, si loin ! Avec les jumelles l'observation se précise, mais avec des aboiements tout proches, le pic vert met les voiles. Je fais de même, lassée non des chiens mais de certains maîtres de chien. Au milieu des flots en crue du Viroin, un couple de cincles irradie d'amour. Mais le moteur de la camionnette de campeurs les fait s'envoler vers l'aval. Il est grand temps d'une écologie sonore. Non seulement nos activités empiètent sur la biosphère, mais aussi nos sons couvrent la biophonie, avec des conséquences méconnues sur le bien-être animal... y compris forcément le nôtre. Les genévriers se prélassent sous le doux soleil de mars. Le bocage m’ouvre le passage dans la pelouse calcicole. J'y dérange le pic-vert qui s'envole silencieusement. Hors de vue, il "rit" aux éclats et un lointain congénère lui répond aussitôt. Plus loin encore, un pic noir tambourine. En contrebas, un chevreuil aboie plusieurs fois.
Tout se tait. Le vent reprend son souffle et se rue vers l’est ; tintinnabulent les feuilles marcescentes du chêne voisin. Pourquoi donc les Fagacées (et d’autres ?) gardent-elles des feuilles sèches tout l’hiver ? Peut-être pour saluer musicalement le printemps. Peut-être pour permettre au dessinateur de labyrinthiser dans un tracé tout en sinuosités. Peut-être pour donner à contempler la fine dentelle d’une fragile existence. Ouf ! Il peut maintenant dormir sur ses deux oreilles, ce petit loir qui ne voulait pas changer ses habitudes alors que les humains tentaient d'effacer l'hiver... L'hiver, ce temps précieux pour se terrer, se taire et écouter les vents, les pluies, les neiges et les forêts...
N.B. : Wapiti remercie Daguet ; isapi remercie Fabre d'Eglantine et Gilles Vigneault. Kiouuuuu... Kiouuuuuu... Tout d'abord, je crois à une machine, mais il s'agit bien d'un cri en mode mineur, régulier, à la lisière du bois de feuillus et conifères mélangés. Rien ne bouge et finalement, un pic noir s'envole silencieusement du tronc où je ne l'avais pas vu. Le cri recommence, sur un autre tronc. Le guide des chants me confirme que ce cri est bien celui d'un pic noir inquiet. Le changement de tronc ne semble pas l'avoir apaisé. Quel est donc ce danger invisible qui le menaçait ? Avait-il perdu son compagnon ou sa compagne ? 2016 semble commencer mal pour lui. |
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February 2024
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